Prévue pour 2020, la rencontre entre le Quatuor Bozzini, le saxophoniste Yves Charuest et le compositeur et contrebassiste Nicolas Caloia était l’une des affiches les plus prometteuses du programme de cette année et les six artistes n’ont pas déçu. La pandémie m’ayant permis de plonger dans l’œuvre enregistrée du Quatuor, j’étais donc bien intrigué de pouvoir les revoir sur scène. Pour débuter le programme, le Quatuor a présenté pour la première fois son interprétation de Four Invocations de Caloia, une composition féroce qui n’était pas sans rappeler son travail au sein du trio à cordes In The Sea et de son big band Ratchet Orchestra. Un des plaisirs de suivre un artiste au travers de ses divers projets est justement d’apprendre à connaître et apprécier son approche envers la composition et l’improvisation, en plus de pouvoir suivre l’évolution de celle-ci. En ce sens, Four Invocations s’inscrit à merveille dans le corpus de Caloia, alternant avec grâce entre les techniques étendues pleines d’intensité, une rythmique robuste et une structure peu orthodoxe. La composition Tautological responses to systemic redundancies du compositeur jef chippewa pour le saxophoniste Yves Charuest et le Quatuor Bozzini composait la deuxième partie du programme et fut aussi enlevante que la première, explorant les possibilités entre l’improvisation et la musique composée en se basant sur le langage très particulier que Charuest a développé comme improvisateur depuis son retour sur scène dans la dernière décennie. Étant fan du plus récent disque solo de Charuest, ce fut un grand plaisir d’entendre chippewa orchestrer une rencontre entre le saxophoniste et un Quatuor Bozzini en mode «réactif» face à la panoplie de sons incongrus émanant du saxophone de Charuest. Si Four Variations de Caloia fut plutôt dense, chippewa misa pour sa part davantage sur l’opposition entre l’action et le silence, avec une partition et des indications plus clairsemées. Pour boucler le programme de cet ultime concert au Carré 150, Caloia est venu rejoindre Charuest et les quatre membres du Quatuor Bozzini pour une courte improvisation. Le tout fut une première de grande qualité qui se classa, pour ma part, comme le plus beau moment du festival.